L'état du droit administratif
Il est ici question de l'État du droit administratif, parce que la matière juridique de ce droit trouve dans l'État sa raison d'être.
L'État n'est-il pas origine et finalité d'un droit administratif tout entier tendu vers ces objectifs d'intérêt général hors desquels l'action publique serait sans justifications ?
Avec le droit administratif, l'État dessine sa cartographie. Il y construit son histoire en donnant à ses choix leur expression juridique : jusqu'où serait-il pensable, sans ce travail d'écriture juridique ? Il s'agit de rechercher, depuis le droit administratif, les empreintes de cette entreprise.
S'il faut se garder de penser que l'État ne serait qu'une production du droit administratif, force est d'admettre que les réalisations de ce dernier appartiennent à l'histoire de l'État. Ainsi sont ici entendus les « récits » du droit administratif : avec eux l'État se rend plus intelligible. On y trouve les traces de sa continuité par-delà ses transformations.
Le droit administratif participe des mutations d'un État voué à changer ses façons d'être et d'agir. Qu'il s'agisse pour lui de questionner ses performances, de repenser ses rapports avec le(s) territoire(s), ou encore de chambouler le modèle de contrôle de l'administration.
Ce programme exige que soient sollicités avec la même attention les figures centrales du droit administratif - service public, puissance publique, justice administrative - et tout un outillage juridique dont l'usage semble éloigné des dispositifs grâce auxquels l'État se reproduit : de la création du déféré préfectoral, à l'expérimentation de formes nouvelles de démocratie locale, en passant par le traitement non juridictionnel des conflits internes à l'administration. Si l'analyse de l'État du droit administratif est inconcevable hors des élaborations politiques de ce droit, elle n'est crédible qu'à la condition qu'en soient reconnus et décrits les supports techniques. L'État se fabrique jusque dans les « détails » du droit administratif.